Quel recul sur le TAVI ?

Publié par adetec le lun, 09/25/2017 - 11:27

Dr Christophe CAUSSIN

entretien réalisé par D. Grévoul le 14 avril 2017

Quel recul a-t-on aujourd'hui sur le TAVI ?

Le TAVI qui est une technique qui commence à avoir une dizaine d'années de maturité puisqu'on peut considérer que le TAVI est passé en routine autour des années 2007-2008.  Avant c'était vraiment des études préliminaires avec quelques patients. C'est une innovation qui continue de très bien fonctionner et même d'étendre ses indications. Initialement c'étaient des contre indications à la chirurgie chez des patients qui étaient porteur de maladie de la valve aortique et de rétrécissement aortique. Maintenant, on a 3 ou 4 études depuis deux ans, chez des patients opérables qui comparent le TAVI à la chirurgie cardiaque et le TAVI se positionne très bien, même chez les patients opérables à faible risque avec des équivalences en terme de mortalité opératoire, de mortalité à 30 jours, et évidemment avec une procédure beaucoup plus légère, avec des durées d'hospitalisation beaucoup plus courtes, un traumatisme moindre, une qualité de vie immédiatement après l'opération qui est bien meilleure qu'après une chirurgie conventionnelle. La dernière étude a été présentée au dernier congrès et publiée dans le "new england journal of medecine" et on retrouve ces données chez des patients qui avaient une mortalité opératoire attendue de l'ordre de 3 %, donc une mortalité très faible, et le TAVI arrive à faire aussi bien, même un petit peu mieux, même si ce n'était pas statistiquement significatif. Donc on est vraiment dans une dynamique de progression du TAVI par rapport à la chirurgie, et de nouvelles études sont lancées chez des patients à bas risque, tout venant, et si ces études continuent à être dans le même terme aussi positives, il est probable que le TAVI deviendra la première ligne de traitement du rétrécissement aortique.  Il existe aussi des progrès sur les différents modèles de valves. On a vu en 2016 une amélioration d'un modèle existant arriver sur la valve medtronic "Evolut R" maintenant, et qu'on avait vécu avec le premier modèle, la valve "edwards" en 2015, donc 2015 et 2016 marquent l'arrivée d'évolutions significatives des valves de TAVI qui gagnent en diamètre, donc avec de plus petits diamètres donc moins traumatisantes pour la voie d'abord fémorale, et  que si en terme de fuite aortique, au moment de l'implantation du TAVI vous pouvez être confronté à des fuites aortiques. Elles sont beaucoup moins nombreuses et mieux contrôlées avec les nouveaux modèles. On devrait aussi avoir l'autorisation en France d'une nouvelle valve de Boston Scientifics, la valve LOTUS qui devrait voir le jour à la rentrée scolaire de 2017 ou début 2018. La valve lotus qui a des caractéristiques assez prometteuses en terme de positionnement. Donc, à la fois les études cliniques s'améliorent et le matériel lui aussi continue de s'améliorer. C'est une technique jeune avec beaucoup de possibilités d'amélioration encore.
Pour la longévité, la technique TAVI étant jeune et proposée initialement à des patients très âgés, on a du mal à avoir du recul… néanmoins on commence à avoir des données à plus de cinq ans avec des résultats qui sont similaires à la chirurgie. Ca nous permet aussi de redéfinir les longévités de valves chirurgicales. Jusqu'à présent, on n'avait pas de réelle définition de la longévité , à partir de quand on disait que la valve avait cessé de fonctionner, c'était uniquement sur des paramètres échographiques, sur des paramètres de réopération, sur des paramètres physiques, de qualité de vie, etc… donc jusqu'à présent il n'y avait pas de définition, et donc là, on commence à poser, à définir une usure de base grâce au TAVI en quelques sortes.
Que se passe-t-il lorsque une prothèse est dégénérée. On peut réopérer ?
On peut refaire un TAVI à la fois sur une bio-prothèse chirurgicale dégénérée ou sur un TAVI dégénéré, on peut refaire un TAVI. Les feuillets de la prothèse qui ont dégénéré, on les replaque contre la prothèse. On remet une deuxième prothèse.

On a évidemment très peu d'expérience de ça, mais, ici, à l'IMM, on a déjà fait un ou deux cas de TAVI dégénéré, puis on a fait plus d'une trentaine de bio-prothèses chirurgicales dégénérées en TAVI.
Les TAVI sont uniquement autorisés dans les centres pratiquant plus de 200 interventions ?
En fait, en France le TAVI n'est autorisé que dans les centres qui ont la chirurgie cardiaque et initialement, sur les critères proposés par la HAS en 2009 ou 2008 les centres devaient être de suffisamment  gros volume pour assurer une certaine expérience aux opérateurs qui devaient faire le TAVI, s'agissant du début de la technique en 2009, le nombre de TAVI était à 24 par an, par centre et plus de 200 chirurgicales, ce qui justifiait d'un certain volume d'activité du centre.
Actuellement, ces critères méritent d'être rediscutés. Déjà on se rend compte que 24 TAVI par an, c'est extrêmement faible, et personne, avec 24 TAVI par an n'est capable d'atteindre une maturité et une expérience suffisante. Là, actuellement, à l'institut Montsouris, on est plutôt autour de 300 TAVI dans l'année et la moyenne des centres français qui sont autorisés tournent autour de 160. Ca a un impact aussi, c'est que ça réduit le nombre de chirurgies de la valve aortique.
En France, actuellement on doit être autour de 9000 TAVI réalisés par an. C'est une maladie très fréquente dont la fréquence s'accroit avec l'âge de la population… et la technique se diffuse c.a.d que les cardiologues commencent à avoir des patients qui ont eu un TAVI, prennent confiance, et n'hésitent plus à nous envoyer des patients même agés pour bénéficier du TAVI . Je crois que c'était autour de 2000 TAVI en 2012, 4-5000 en 2013, 6000 en 2014 etc… ça augmente de 20% par an.


Durée d'hospitalisation.

Quel est l'impact du coût des valves sur les interventions comme le TAVI ou les valves chirurgicales classiques ?


Le coût du TAVI, c'est un sujet assez épineux parce que la valve est beaucoup plus chère que est la valve chirurgicale. Le coût de la valve TAVI a été fixé, il y a plusieurs années (il y a dix ans) au moment du démarrage en routine, et à l'époque on se comparait à de très hauts risques chirurgicaux et du coup avec des patients qui coûtaient très cher parce que après ils restaient 15 jours, trois semaine en réanimation, et du coup, les deux séjours ont été calculés pour être à peu près équivalents et ça s'est joué sur le prix de la valve. Actuellement, la valve TAVI coûte 16 000 € et la valve chirurgicale autour de 2 500-3 000 €. Du coup, la durée de séjour plus courte compense le prix de la valve, sauf que maintenant, comme on s'intéresse à des patients à plus faible risque, le coût de la valve se retrouve excessif par rapport au gain que l'on a sur la durée du séjour. Les patients qui ont une chirurgie de la valve conventionnelle restent une dizaine de jours à l'hôpital et puis vont le plus souvent en rééducation, mais la différence n'est pas si importante.

Si l'on considère une augmentation conséquente du nombre de TAVIs réalisés, il est permis d'espérer une diminution du coût des prothèses ?
Il y a un système de rétrocession des compagnies en fonction du volume. A partir d'un certain volume, les compagnies vendent moins cher la valve à la sécurité sociale. D'autre part, l'arrivée de nouveaux constructeurs va faire décliner le prix de la valve.
Ceci dit, globalement, en terme de coût pur, indépendamment du traitement des patients, réaliser un TAVI chez un patient qui a un rétrécissement aortique sévère, c'est économiser de l'argent car cela évite plusieurs ré-hospitalisations pour œdème pulmonaire, etc…, des hospitalisations très prolongées, et du coup, finalement, le coût du traitement est moins important.