L’aorte est l’artère principale de l’organisme, elle commence à la sortie du cœur et donne naissance à l’ensemble du système artériel, amenant ainsi du sang oxygéné à la totalité des organes et tissus qui composent le corps humain.
Dans le thorax, l’aorte thoracique se divise en plusieurs segments :
L’aorte ascendante : segment le plus souvent touché par la dilatation anévrismale et le plus fragile. Il comprend la racine aortique (portion initiale de l’aorte dans laquelle se trouve la valve aortique et d’où naissent les artères coronaires qui vascularisent le cœur) et l’aorte sus-coronaire (fig a)
a) séparée par la jonction sino-tubulaire (JST) en 2 segments, la racine aortique et l’aorte sus-coronaire ;
b) détail des éléments de la racine aortique ;
c) pourtour sigmoïde de l’anneau aortique ;
d) à droite : racine aortique ouverte entre les sinus coronaires droit et gauche, à gauche : les cuspides ont été réséquées, révélant leur insertion semi-lunaire et la forme sigmoïde de l’anneau aortique
La valve aortique est constituée le plus souvent de trois feuillets (valves tricuspides), parfois de deux feuillets (valves bicuspides), qui s’appliquent l’un contre l’autre et assurent la fonction anti-retour. (fig 2). En cas d’anévrisme de la racine aortique, la dilatation est parfois tellement importante que la valve ne se ferme plus de façon étanche (insuffisance aortique), ce qui fatigue le cœur à cause du reflux de sang dans le ventricule gauche à chaque battement.
Figure 2 : Vues échographiques et opératoires de valves tricuspides et bicuspides
L’aorte est dite anévrismale lorsqu’elle présente une dilatation importante, avec perte du parallélisme de ses bords. Lorsque cette dilatation est très importante, la paroi aortique peut se déchirer (dissection aortique nécessitant une opération en urgence) ou se rompre (mort subite).
Aussi, afin de protéger le cœur de ces complications mortelles, les anévrismes de l’aorte ascendante doivent absolument être surveillés puis opérés soit lorsque le diamètre de l’anévrisme est important, soit pour traiter une insuffisance aortique sévère soit pour les deux raisons. Les risques de complication sont particulièrement critiques au moment de la grossesse ou au décours d’une poussée d’hypertension artérielle.
Diagnostic
Lorsqu’un anévrisme est découvert, il est nécessaire de pratiquer des examens radiologiques : une échographie cardiaque et un scanner avec synchronisation cardiaque. Ces examens précisent la taille et l’extension de l’anévrisme ainsi que l’état de la valve aortique. Il faut également s’assurer de la présence ou de l’absence d’autres pathologies cardiaques associées au niveau des artères coronaires et/ou des autres valves du cœur. (fig 3 & 4)
Figure 3 : a) Analyse échographique de l’aorte ascendante : mesure standardisée des 4 diamètres aortiques (1) Anneau aortique : diamètre interne ; (2) Sinus de Valsalva ; (3) Jonction sino-tubulaire (JST) ; (4) Aorte sus-coronaire ; b) Mesure de la hauteur de coaptation valvulaire (Hc), et de la hauteur effective de coaptation (He : distance entre la base de l’anneau aortique et le sommet de la coaptation valvulaire)
Figure 4 : Scanner avec synchronisation cardiaque et reconstructions 3D d’un anévrisme de la racine aortique
Ces informations vont permettre de préciser si une intervention chirurgicale est nécessaire au cours de réunions multidisciplinaires qui réunissent chirurgiens, cardiologues, radiologues et selon des recommandations internationales publiées par les Sociétés Savantes de cardiologie et de chirurgie cardiaque.
L’indication est individualisée, en tenant compte des facteurs de risque de chacun. Bien que la chirurgie soit de mieux en mieux maîtrisée, le risque opératoire n’est jamais nul. En l’absence de symptôme (douleur thoracique), l’indication opératoire est portée sur un faisceau d’arguments, notamment (Fig 5):
le diamètre aortique maximal :
≥ 55 mm : indication opératoire formelle que la valve soit bicuspide ou tricuspide
En présence d’un syndrome de Marfan : indication opératoire si le diamètre maximal est supérieur ≥ 50 mm. En présence de facteur de risque (antécédent familial de dissection aortique, ou de mort subite) ou d’un désir de grossesse, ou d’une insuffisance aortique ou mitrale importantes, une indication opératoire préventive pourra être proposée à partir de 45 mm
En présence d’une bicuspidie, l’indication opératoire sera posée à 50 mm en présence de facteur de risque : antécédent familial de dissection aortique, ou de mort subite, hypertension artérielle, coarctation aortique. En l’absence de facteur de risque l’indication opératoire sera portée à partir de 55 mm
En présence d’un syndrome de Turner, l’indication opératoire sera posée pour un diamètre supérieur 27 mm/m2 de surface corporelle.
l’augmentation du diamètre aortique. Une surveillance annuelle est nécessaire (semestrielle lorsque l’on s’approche des diamètres où la chirurgie est recommandée). Une augmentation ≥ 2 mm sur deux examens successifs à un an d’intervalle (ou moins) fera poser l’indication opératoire. Afin d’avoir une précision de mesure suffisante, il faut dans l’idéal qu’il s’agisse de 2 scanners avec synchronisation cardiaque lus par le même radiologue.
Traitement
Figure 5 : Recommandations de la société européenne de cardiologie pour la prise en charge des anévrismes de l’aorte ascendante
Le traitement des anévrysmes est uniquement chirurgical par une opération à cœur ouvert. Lorsque les diamètres de l’aorte sont inférieurs aux critères opératoires, il est important de prendre un traitement par Beta Bloqueurs afin de protéger l’aorte en diminuant la pression artérielle et ainsi ralentir l’augmentation des diamètres.
La pratique du sport (course à pied, vélo, natation) n’est pas contre indiquée mais il faut cependant éviter les sports à à-coups tensionnels violents (foot, tennis, squash, haltérophilie…)
Anévrismes de la racine aortique
Dans les anévrysmes de la racine aortique il sera nécessaire dans tous les cas de remplacer l’aorte par un tube en dacron dans lequel seront reimplantées les artères du cœur. Il y a ensuite deux possibilités face à la valve :
-Remplacement de la valve aortique et remplacement de la racine (intervention de Bentall)
-Réparation de la valve aortique et remplacement de la racine aortique (Réparation valvulaire)
Toutes ces opérations se réalisent sous circulation extracorporelle, le corps est relié à une machine cœur poumons qui assure l’apport de sang oxygéné à tout l’organisme pendant le temps principal de l’intervention. Quelle que soit la chirurgie effectuée, il s’agit d’une opération à cœur ouvert comportant un risque chirurgical, anesthésique, infectieux et hémorragique parfois vital (risque opératoire <3 à 5 % en dehors du cadre de l’urgence).
Intervention de Bentall avec remplacement de la valve
Elle a été mise au point en 1968. Elle consiste en un remplacement de la valve aortique et de l’aorte ascendante par une prothèse vasculaire en Dacron montée sur une prothèse valvulaire mécanique ou biologique (Figure 6) et dans laquelle sont réimplantées les artères coronaires.
Il est recommandé d’avoir une valve mécanique avant 60 ans et une valve biologique au delà. Cependant l’âge d’implantation des valves biologiques à tendance à diminuer avec l’amélioration de la qualité des prothèses. Le choix final du type de prothèse reste bien entendu un choix de vie très intime du patient qui va la porter en fonction des avantages et inconvénients de chacune.
Valves mécaniques
En cas d’implantation d’une valve mécanique, le risque de ré opération est faible mais ce type de valve nécessite de prendre un traitement anticoagulant à vie pour fluidifier le sang. Celui-ci est en général bien toléré, il se prend sous forme de comprimés tous les jours et nécessite une surveillance régulière (prise de sang mensuelle ou tous les 15 jours) en liaison avec votre médecin traitant, afin d’éviter :
un surdosage exposant au risque de saignement (hémorragie)
un sous dosage exposant au risque de thrombose (caillots pouvant migrer dans la circulation générale, notamment vers les artères du cerveau ou des membres)
En cas de prothèse mécanique, le risque annuel de réopération est compris entre 0 et 2,7%, celui des complications thrombo-emboliques (AVC : accident vasculaire cérébral) de 0 à 3,2 %. Il est compris entre 0 à 2,5 % pour les complications hémorragiques (saignement), et approche 1 % pour les complications infectieuses (endocardite : infection de la valve).
La valve mécanique fait par ailleurs un petit bruit type « tic-tic » que le patient perçoit lorsqu’il est seul dans un lieu calme. Cette perception sonore est variable en fonction de la corpulence du patient. Après un temps d’adaptation, il est en général bien toléré.
Par ailleurs, la prise d’un traitement anticoagulant au long cours nécessite une vigilance sur la consommation de certains aliments qui peuvent modifier l’efficacité des anti vitamines K (AVK).
(Figure 7:Tableau des aliments pouvant perturber l’action des anticoagulants).
(INR = International Normalized Ratio)